15

Bak se hâta de traverser le fleuve et arriva chez son père peu avant midi. Il n’y trouva que le sergent Houy. Le médecin et le nouveau garde désigné par Maïherperi s’étaient rendus dans un village voisin pour soigner le vieux chef, qui souffrait de douloureuses raideurs aux articulations. Ils projetaient en outre de visiter plusieurs patients dans les environs. Houy avait eu beau jurer qu’il était guéri, ils l’avaient laissé afin qu’il se repose, tout en surveillant la maison et les bêtes.

Sachant que Ptahhotep n’aurait pas besoin du nouvel esquif procuré par Menna, Bak retourna sur la rive et emprunta la petite barque. Il la tira dans le courant, hissa la voile et se lança dans une enquête qui ne constituait pas moins une gageure que celle de Kasaya. Il avait mal vu le bateau de pêche qui les avait renversés et n’avait guère prêté attention à celui amarré sur le quai de Ouaset, aussi ne pouvait-il être certain que les deux ne faisaient qu’un. Mais si son raisonnement était juste, et si le chef des pilleurs de tombes éliminait tous ceux qui risquaient de le désigner, les pêcheurs devaient être retrouvés avant de connaître le même destin qu’Imen. Avec une chance exceptionnelle et un sourire bienveillant d’Amon, il parviendrait peut-être à repérer le bateau, puis les hommes eux-mêmes.

Un léger vent du nord gonflant la voile, il remonta le courant en dépassant l’endroit où le bateau de pêche avait disparu. Puis il se laissa porter au fil de l’eau, se propulsant vers la berge grâce à ses avirons afin d’examiner une embarcation tirée à sec pour la nuit. La journée était radieuse, la chaleur tempérée par une brise idéale pour naviguer. S’il ne s’était pas concentré sur sa mission, il aurait beaucoup apprécié ce voyage.

Il apercevait rarement un bateau solitaire. La plupart étaient groupés sur la plage, leurs filets déployés pour sécher. La pêche avait été bonne et la majorité des hommes était rentrée à midi pour vendre la prise du jour ou pour la livrer dans un domaine s’ils travaillaient pour un riche propriétaire. Inévitablement, un ou deux étaient restés derrière pour raccommoder un filet ou une pièce de bois, ou encore pour nettoyer quelques poissons qu’ils rapporteraient chez eux. Comme la plupart de ceux qui menaient jour après jour une dure vie de labeur pour un gain dérisoire, ils étaient d’un naturel joyeux et connaissaient aussi bien les affaires des autres que les travailleurs de la terre. Or c’était sur cela que Bak pensait pouvoir compter.

 

Il avait dû s’arrêter six ou sept fois quand il rencontra un canal latéral entre une plage étroite et une île basse – un écueil qui avait résisté aux crues annuelles assez longtemps pour que de hautes herbes et des buissons s’y enracinent. Plus d’une douzaine de bateaux de taille modeste avaient été halés sur la plage, qui s’étendait au pied d’un banc de vase presque vertical. Au sommet, à l’ombre d’un acacia, deux hommes ceints de pagnes rudimentaires réparaient des filets. À coups de rames, Bak s’en approcha, sauta sur la terre ferme et tira à demi son esquif de l’eau, juste au-dessous d’eux.

— Je suis le lieutenant Bak, de la police medjai.

Il ne vit pas la nécessité de préciser que ses Medjai se trouvaient loin, au pays de Ouaouat, et se borna à expliquer :

— Je cherche un bateau…

— Un bateau !

Riant joyeusement, le plus âgé se tapa sur la cuisse. Comme les filets qu’ils ravaudaient, son compagnon et lui empestaient le poisson et l’odeur du fleuve.

— Elle est bien bonne, celle-là ! La meilleure que j’aie entendue de la journée.

Le plus jeune lança en désignant la rangée d’embarcations alignées sur la rive :

— Voilà pour toi, lieutenant ! Ou que dirais-tu de ceux-ci ?

S’esclaffant, il décrivit un grand cercle du bras pour montrer les nombreux bateaux qui passaient sur les flots.

— Un bateau de pêche, indiqua Bak avec un demi-sourire pour montrer qu’il ne leur en voulait pas, avant d’ajouter d’un ton grave : C’est une question de vie ou de mort. Pouvez-vous m’aider ?

Ils cessèrent de rire et échangèrent un coup d’œil facile à interpréter : oui, ils l’aideraient, mais sans se donner de mal, et ils ne lui diraient que ce qu’il leur demanderait. Ce n’était ni la première ni la dernière fois que le policier se heurtait à ce genre d’attitude.

Posant les filets, les pêcheurs se levèrent.

— Tes désirs sont des ordres, lieutenant ! déclara le plus jeune en adressant un clin d’œil à son compagnon.

Ignorant son attitude moqueuse, Bak marcha avec eux le long de la rive, scrutant les coques de bois à la recherche de signes de collision. Plus de la moitié étaient des bacs utilisés pour convoyer la population, les bêtes et les marchandises à travers le fleuve, et n’offraient aucun intérêt à ses yeux. Les cinq restants étaient des bateaux de pêche. Aucun ne semblait différent des vingt autres qu’il avait déjà examinés en amont. Tous gardaient la cicatrice de heurts avec des objets flottants, d’amarrages négligents. Dans la plupart des cas, le bois marqué avait noirci au fil du temps, attestant que les dégâts étaient anciens. Quand la cicatrice était récente, elle se trouvait trop haut, trop bas ou trop à l’arrière sur la coque, ou alors sa forme ne concordait pas. Contrarié par cet échec, Bak rebroussa chemin le long de la rangée pour les voir à nouveau.

— Aucun d’entre eux n’est celui que tu espérais trouver ? demanda le plus jeune, échangeant un sourire goguenard avec son compagnon.

— Je ne peux en être sûr, toutefois je ne le pense pas.

— Je vois que tu n’es pas un homme du fleuve, observa le plus âgé.

Bak comprit l’allusion implicite qu’il n’y connaissait rien et que, par conséquent, il ne savait même pas ce qu’il cherchait. Il lança au pêcheur un regard froid.

— Ne me sous-estime pas, vieil homme. J’ai grandi près d’ici. Les bateaux ont toujours fait partie de ma vie.

Le second s’avança en grimaçant un sourire.

— Si tu nous disais ce que tu veux, nous serions mieux à même de t’aider.

— Oui, lieutenant ! ajouta le plus vieux, faisant montre d’un empressement exagéré. À quoi ressemblait-il, ce rafiot ?

— Tout ce que je peux affirmer, c’est que la coque était sombre et usée par les intempéries, admit Bak.

À la façon dont les deux autres le regardèrent, il comprit qu’ils se sentaient supérieurs, eux qui reconnaissaient aisément chacune des embarcations qui empruntaient le fleuve.

— Il est venu sur nous par-derrière et nous a fait chavirer. L’esquif de mon père a coulé au milieu du courant. Nous ne pensions qu’à survivre et nous l’avons à peine entrevu.

Le plus jeune écarquilla les yeux.

— Ton père ? Le médecin Ptahhotep ? On a entendu parler de cet accident.

— Tu le connais ?

— Oh, oui, lieutenant ! répondit-il avec chaleur. Sans lui, mon épouse et mon premier-né seraient morts. C’était il y a un an. Ces moments-là, je ne les oublierai jamais.

Le plus vieux considéra Bak avec intérêt.

— Tu es arrivé voici quelques jours de la frontière sud, pour tenter d’arrêter les accidents au Djeser Djeserou.

— Tu sais que… Mais bien sûr ! dit Bak, riant tout bas. Tu n’ignores rien de ce qui se passe le long du fleuve.

Les deux hommes rayonnèrent.

— Viens, lieutenant, dit le plus vieux. On a de la bière et un coin d’ombre à partager.

Bak détestait l’idée de passer le peu de temps dont il disposait dans ce seul endroit, mais il avait soif ; de plus, une chance infime existait que, possédant plus d’informations, ils se rappellent des faits qui lui seraient utiles. Il s’installa auprès d’eux sous l’acacia, une cruche de bière à la main, puis leur relata l’accident et tous les détails dont il se souvenait à propos du bateau. Même à l’abri du vent, l’odeur de poisson demeurait forte et le poussa à abréger son récit.

Quand il eut fini, le plus jeune regarda son compagnon.

— Ça pourrait être le bateau de Païri et Houmaï. Il y a une éraflure toute récente sur la coque. Mais pourquoi auraient-ils voulu faire chavirer le médecin ? Ou même toi, lieutenant ?

— Qui sont Païri et Houmaï ? interrogea Bak, refusant de laisser croître l’espoir au fond de lui.

— Des frères, expliqua le plus âgé en se grattant énergiquement l’intérieur de la cuisse. D’habitude, ils tirent leur bateau ici quand la pêche est finie. C’est bizarre qu’ils ne soient pas encore là, dit-il, pensif, en contemplant la rangée d’embarcations sur la plage.

— Leur père est mort il y a plusieurs années et leur a laissé une petite propriété, ajouta son ami. Ils sont souvent les premiers à ramener leur prise afin de rentrer à temps pour s’occuper du bétail. Je me demande pourquoi, puisqu’ils ont un jeune berger qui s’en charge très bien.

Une propriété. Un endroit où l’on produisait sans doute du miel. Bak sentit son intérêt décupler.

— Leur bateau a heurté un obstacle, il y a deux jours. Aucun doute là-dessus. Ça a laissé une longue entaille d’un côté de la proue. En y repensant, remarqua le vieil homme, elle se trouve à peu près au niveau de la poupe d’une barque comme celle de ton père.

— On aurait dû y faire plus attention, se demander ce qui s’était passé, reconnut son jeune compagnon. Ils ne sont pas du genre à avoir un accident. Ce sont des marins prudents, qui prennent soin de leurs biens – en particulier de ce bateau.

Sans pouvoir croire à sa chance, Bak posa la bière à côté de lui.

— Il n’était pas ici, le soir où nous avons chaviré ?

Après une longue discussion pour définir qui avait fait quoi et quel soir exactement, le plus âgé conclut :

— Pas quand je suis parti. Ces filets sont vieux – mon maître, cet avare, tient serré les cordons de sa bourse – et je les répare souvent jusqu’au coucher du soleil. Comme ce jour-là.

En silence, Bak adressa une prière de gratitude à Amon. Contre toute attente, il avait très probablement trouvé ceux qu’il cherchait, les pêcheurs, mais aussi les producteurs de miel.

— Sont-ils du genre à s’approprier ce qui, de droit, appartient à d’autres ?

— Qui résisterait à la tentation, si le butin était assez riche ? gloussa le plus vieux.

— Ils triment de l’aube au crépuscule dans l’espoir d’une vie meilleure, mais est-ce qu’ils voleraient ? s’interrogea le plus jeune, qui finit par hausser les épaules. Peut-être que oui. Peut-être que non.

Bak se leva, prêt à partir.

— Pouvez-vous me décrire ces deux frères ?

Le plus vieux ramassa le filet et trouva l’accroc qu’il lui restait à raccommoder.

— Païri, c’est un costaud avec des épaules larges, et plus grand que toi. Il a une tête carrée, pas bien belle à regarder.

— Et une figure plate comme une semelle de sandale ! ajouta le plus jeune en riant.

Un visage plat ! Bak retint un cri de joie. Il avait envers ces deux pêcheurs une dette dont il ne pourrait jamais s’acquitter. Entre autres informations, ils avaient identifié ceux qui l’avaient lâché dans le puits des pilleurs.

— Houmaï ressemble beaucoup à son frère, indiqua le vieux, mais en plus fin, avec un visage plus rond. Un peu comme un œuf.

Bak pensa aux nombreux endroits où un bateau pouvait être tiré, le long du fleuve, au temps qu’il perdrait à le chercher alors qu’il voulait, en fait, mettre la main sur ses agresseurs.

— Comment puis-je trouver leur propriété ?

 

Regrettant de ne pas avoir Kasaya pour le seconder, Bak suivit rapidement l’étroit sentier qui passait au-dessus des champs sur un surplomb de terre, au bord du canal d’irrigation à sec. Devant lui, la propriété semblait aussi petite que celle de son père, mais la maison avait besoin d’être chaulée et les deux abris en brique crue se trouvaient dans un état avancé de décrépitude, avec des murs en partie effondrés. Dans un champ à l’est, un grand troupeau de moutons et de chèvres se nourrissait de la maigre glanure qui subsistait après les moissons. Un garçon de huit ou neuf ans, assis à l’ombre d’un bouquet de tamaris, gardait les bêtes tout en observant Bak. Le chien jaune près de lui se leva et aboya, puis se tut sur l’ordre sec de son maître. Un âne broutait à côté, indifférent à ce qui l’entourait.

Quelques touffes de végétation oubliées par les animaux voraces indiquaient que l’on avait cultivé du trèfle, une bonne source de nectar pour les abeilles. Bak ne vit pas de ruches à la lisière du champ, mais il distingua, sur le toit de la maison, un large groupe de pots cylindriques maintenus ensemble par de la boue séchée.

« Oui ! » pensa-t-il, satisfait au-delà de toute mesure. Il était tombé sur ceux-là mêmes qu’il avait chargé Kasaya de trouver. Des éleveurs d’abeilles, qui étaient aussi des pêcheurs et des pilleurs de sarcophages. Ces quelques heures d’efforts se révélaient plus que gratifiantes.

Il s’arrêta au bord du champ. Hormis les bêlements d’un agneau qui avait perdu sa mère et des aboiements lointains, on n’entendait pas un bruit. La bâtisse paraissait déserte. Les apparences, toutefois, étaient souvent trompeuses. Peut-être les pêcheurs l’avaient-ils vu approcher, peut-être même l’avaient-ils reconnu. Il se pouvait qu’ils le guettent, dans l’espoir de le capturer par surprise.

Où ? La maison et les abris étaient en terrain découvert. Au crottin qui parsemait l’herbe, Bak devina que le bétail paissait où il voulait. Le jardinet était entouré d’une sorte de haie, faite de branches d’acacia séchées, hérissées d’épines. Il coula un regard à travers et constata que les deux abris étaient vides. Dans le champ couvert de chaume, le gamin et son chien avaient disparu parmi les bêtes et ne lui accordaient aucune attention.

Empoignant son bâton de commandement tel un gourdin, il s’avança vers la maison. À une dizaine de pas de l’entrée, il appela :

— Païri ! Houmaï ! J’ai à vous parler.

Il ne reçut aucune réponse.

Évitant de marcher sur l’herbe sèche qui aurait craqué sous ses pieds, il s’approcha subrepticement de la porte et s’arrêta pour écouter. Tout était silencieux. Il resta où il était, attendit encore. Pour refréner son impatience, il compta, comme une femme se préparant à donner la vie. Il s’était fixé d’aller jusqu’à deux cents et en était à la moitié quand sa patience porta ses fruits. Il perçut un léger bruissement à l’intérieur, sur la droite. Cela pouvait être causé par une souris ou un rat, toutefois, il ne le pensait pas. En silence, il s’approcha de l’embrasure.

D’un bond, il franchit le seuil. Dans la pénombre, il entrevit une silhouette là où il s’y attendait. Il lui fit tomber des mains l’objet qu’elle tenait et, de son poing libre, la frappa en plein dans le ventre.

— Oufff ! entendit-il, et un homme s’écroula à ses pieds, lâchant sa lance et son boucher qui résonnèrent par terre.

La lumière filtrant par la porte ouverte tomba sur son visage.

— Kasaya !

Bak s’agenouilla près du jeune Medjai.

— Mon lieutenant ?

Kasaya, grimaçant de douleur, souleva les épaules du sol en terre battue et se redressa.

— Qu’est-ce que tu fais ici, chef ?

— Pourquoi n’as-tu pas répondu lorsque j’ai appelé ?

— Je n’ai pas reconnu ta voix. Je ne m’attendais pas à ce que tu viennes.

Bak aida le Medjai à se relever, puis à s’asseoir sur un tabouret au milieu de la pièce chichement meublée.

— J’aurais pu te tuer… dit-il, plein de remords.

Kasaya lui adressa un faible sourire.

— Si tu m’en avais laissé l’occasion, je t’aurais fracassé le crâne d’un coup de masse.

Bak avait répété mille fois à ses Medjai de ne pas tuer un suspect sans lui laisser une chance de s’expliquer. À l’évidence, Kasaya ne prenait pas tout à fait cette recommandation à cœur. Le jeune homme se massa le ventre avec précaution.

— Il va falloir que je prévienne les hommes de notre compagnie de ne pas te contrarier, chef.

— Je pensais frapper un meurtrier, et non un ami, répondit Bak en souriant. Et maintenant, raconte-moi ce qui t’a conduit ici.

— J’ai rencontré un homme, dans un lieu de plaisir à peu de distance au sud. Quand je lui ai montré ton dessin, il s’est souvenu d’avoir vu le pêcheur Païri avec une cruche semblable. Je suis venu lui demander qui la lui avait donnée. Par chance, j’ai commencé par discuter avec le petit gardien de troupeau. Il connaissait très bien ces jarres, puisque c’est sa mère qui les fabrique ! Païri et son frère Houmaï lui donnent du poisson frais en échange de quelques-unes de ces poteries, lorsqu’elle les a fait sécher après les avoir tournées. Ils y ajoutent le dessin, puis les lui rendent afin qu’elle les cuise dans son four.

— Qu’est-elle pour ces hommes ? Une sœur ? Une mère ?

— Ni l’un ni l’autre. Elle habite la maison voisine. Le père du petit est mort il y a deux ans et il a plusieurs jeunes frères et sœurs. Ils gagnent leur subsistance de leur mieux. Le gamin garde les troupeaux de Païri et Houmaï et, en retour, il peut faire paître ses bêtes avec les leurs.

Bak examina la pièce, qui ne reluisait pas de propreté et dégageait une forte odeur de poisson, de corps rarement lavés. Une brève fouille ne révéla pas d’objet de valeur. Soit les deux frères avaient pris la fuite en emportant toutes leurs possessions, soit ils vivaient dans une misère sordide.

— Pas grand-chose qui en vaille la peine, après Amon seul sait combien d’années à piller des tombes.

Kasaya, dubitatif, parcourait encore la pièce des yeux.

— Si ce sont bien nos voleurs, chef, où ont-ils caché toutes les richesses obtenues en échange des bijoux anciens ?

— L’esprit malin les conserve peut-être.

— Pour eux, ou pour lui-même.

 

— Mais oui, je les ai vus sortir la nuit. Ils sont seuls tous les deux la plupart du temps, mais quelquefois un autre homme part avec eux.

L’enfant, les yeux agrandis par la curiosité, était tout animé par cette discussion passionnante qui le distrayait de sa solitude. En répondant à leurs questions, il caressait les oreilles veloutées de l’agnelet qu’il tenait dans ses bras.

— À quoi ressemble cet homme ? interrogea Bak.

— Il est plus grand qu’eux, et aussi moins massif, mais à part ça je n’en sais rien. Je suis toujours ici avec les bêtes, trop loin pour le voir dans le noir.

— Ils partent souvent ?

— Je ne crois pas, mais peut-être que parfois je dors lorsqu’ils s’en vont. Mon chien aboie quand il sent des étrangers, pas des gens qu’il connaît. Ou alors s’il y a un chacal, ou qu’une chèvre ou un mouton va s’égarer.

— Y a-t-il une certaine régularité dans leurs sorties nocturnes ? Par exemple…

Bak hésita, ne souhaitant pas l’influencer.

— Partent-ils tôt ou tard ? Souvent ou rarement ? Une seule nuit ou plusieurs d’affilée ?

Le berger posa l’agneau près de sa mère et réfléchit tout en grattant sa poitrine osseuse.

— D’habitude, ils partent juste après la tombée de la nuit, quand la lune est voilée. Parfois, ils y vont plusieurs soirs de suite après une longue interruption, d’autres une seule fois. Ça n’est jamais régulier.

— Sais-tu où ils sont, en ce moment ?

— Non. Ils sont partis tôt ce matin, comme toujours, et depuis je ne les ai pas revus.

Après quelques autres questions qui n’aboutirent à rien, Bak gratifia le jeune garçon d’un jeton de bois couvert de plâtre, que sa mère pourrait remettre à l’intendant de la garnison locale en échange de céréales, ou de toute autre denrée dont elle aurait besoin. Les policiers reprirent le chemin du fleuve, vers l’esquif de Ptahhotep.

— L’esprit malin repère les tombes, dit Bak à Kasaya, puis ces deux-là, ou peut-être tous les trois, percent un tunnel pour le piller.

— Et Imen montait la garde afin que personne ne les surprenne pendant la nuit.

Bak hocha la tête.

— Une fois qu’ils ont ouvert un passage, ils s’accordent une ou deux nuits pour rafler tous les objets précieux. Cela fait, ils bouchent l’ouverture de manière à tromper les gardes qui patrouillent dans les cimetières.

— Je ne serais pas surpris que Païri et Houmaï soient partis pour toujours, remarqua Kasaya. À moins qu’ils aient été assassinés, eux aussi ?

— À leur place, à l’instant même où j’aurais appris la mort d’Imen, je me serais enfui pour ne jamais revenir.

Le souffle de Seth
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